30 août 2012
4
30
/08
/août
/2012
13:30

Durant mes semaines de vacances, non seulement j'ai pu bien évidemment me détendre mais aussi prendre le temps de réfléchir. Je veux dire, vraiment réfléchir. De ces réflexions qui vous font parfois perdre le sommeil ou avoir l'air distrait dans la journée... J'ai cherché à prendre du recul sur certaines choses, certaines difficultés qui pourraient faire parfois de ma vie un enfer. Voyez-vous, pour ceux qui ne me connaissent pas encore, je suis une personne en situation de handicap. J'ai fait le choix, il y a bien longtemps maintenant, de vivre le plus normalement possible. Et cela est possible à partir du moment où les choses sont organisées et choisies en conséquence.
Je choisis volontairement d'illustrer cela avec une partie très précise de ma vie. Se faire accompagner au quotidien par des auxiliaires de vie. Voilà une paire d'années maintenant que mon quotidien est rythmé par la présence de ces personnes à mes côtés chaque jour. J'ai appris à composer avec cela même si cela n'a pas du tout été facile au tout début et même si cela reste difficile encore aujourd'hui, certains jours. Quand la machine est bien huilée et qu'il n'y a aucun grain de sable qui vient interrompre la machine (ouh la belle image !), je dirais que je vis cela plutôt bien. Me surprenant même à me dire que ma vie est chouette, que je vis comme tout le monde, voire un peu plus encore les jours de grande forme ! Ces auxiliaires de vie, dont certaines deviennent au fil du temps un peu plus que cela parfois..., font partie intégrante de moi. Ce principe est acquis et je suis même fière de m'en sortir et de pouvoir souffler aux gens et au monde que ma vie est normale ! Que je suis (presque) libre...
Sauf que mon discours devient tout autre dès que quelque chose commence à mal fonctionner. Comme par exemple, une auxiliaire de vie qui prend trop de libertés durant ses interventions et cela au détriment de ma propre liberté (si chère et précieuse à mon coeur...). Ou bien encore un prestataire de services décidant de mettre fin au contrat qui nous lie pour des raisons plus que foireuses et non recevables. Ne prenant pas conscience que cette décision de leur part peut être lourde de conséquence pour moi. Car, à chaque fois, je dois recommencer les mêmes et interminables recherches de nouvel organisme pouvant répondre à mes besoins.
Actuellement, je suis en plein dedans, comme on dit ! L'association qui assure mon aide au coucher tous les soirs me laisse tomber (oserai-je dire comme une vieille chaussette ?!) et la période de préavis est entamée. La fin est donc proche. Et depuis quelques jours, je suis en conflit avec l'auxiliaire de vie qui intervient chaque soir. Pour vous faire la version courte, il est normalement établi que je suis seule décisionnaire en ce qui concerne mon horaire de coucher (différent en fonction des soirs et des activités que je souhaite avoir...). Sauf. Sauf que cette personne cherche à m'imposer un horaire ne correspondant pas à ma demande. Allant même jusqu'à me faire du chantage, profitant de l'absence de mon conjoint un soir... Ce chantage consistait à me faire accepter un horaire tôt dans la soirée, faute de quoi elle ne passerait que 2h après l'heure que je demandais (bien trop tard pour moi, donc...).
Cette situation me met hors de moi, d'une manière que peu de monde peut imaginer. Pourquoi ? Parce qu'il est question de ma liberté. Et j'entends par là, le fait de pouvoir faire ce que je veux, quand je veux et comme je veux. Comme tout le monde. Il est absolument intolérable pour moi que, sous prétexte que j'ai besoin d'aide pour certaines choses, une personne décide à ma place et m'impose quoi que ce soit. Être en situation de handicap ne sous entend, à aucun moment, être incapable. J'insiste volontairement sur ce mot... Chaque jour que je vis et affronte est aussi un combat contre toutes ces idées reçues qui aimeraient dire que je (et 'on' au sens plus large...) ne suis pas capable de penser, décider, avoir une opinion ou bien même être maître de ma vie et de mon destin. Je suis, certes, une personne 'dépendante' mais avec un grand besoin d'indépendance ! Qu'on se le dise...
Dans mes moments de faiblesse, où tout cela devient pesant, je me demande parfois si je ne devrais pas me contenter de plier à toutes les exigences de ces personnes (auxiliaires de vie ou associations...) afin de ne plus avoir de tels conflits et de tels combats. Mais je n'y arrive pas. La simple idée qu'on puisse profiter de la faiblesse d'une personne en situation de handicap me révolte ! Et quand je me bats, ce n'est pas uniquement pour moi mais c'est aussi pour les autres. Ceux qui ne peuvent pas se battre, n'en ont pas la force ou alors ceux qu'on ne laisse pas faire sous prétexte qu'ils sont dépendants et dans le besoin. Je pense que j'aurai ce combat jusqu'à la fin de mes jours, en tout cas, tant que j'en aurai l'énergie, je le ferai. J'ai choisi de ne pas dépendre de ma famille, de mon conjoint et de mes ami(e)s pour tous les 'gestes essentiels de la vie quotidienne' en faisant appel à des prestataires extérieurs. Maintenant, j'aimerais que cela ne se fasse pas au détriment de mes propres choix ou mes propres envies. Je garde espoir que cela soit encore possible aujourd'hui, malgré les nombreuses difficultés que je rencontre...
Et s'il ne fallait conclure ce billet que par une seule phrase, je dirais que la dépendance ne devrait jamais empêcher la liberté. Jamais.